14 octobre 2005 - Après la lutte Canadien-Nordiques, et malgré les guerres de tranchées que se livrent encore les Bruins et le Tricolore, aucune rivalité n'a davantage de ramifications que celle qui oppose Montréal à Toronto depuis 1917.
Samedi soir, une autre page de cette épopée qui rassemble et divise tant d'amateurs de hockey à travers le pays sera écrite. Les duels Canadien-Maple Leafs débordent largement du cadre sportif.
C'est le bleu contre le rouge. C'est une bataille entre les deux plus grandes villes du Canada. C'est aussi, et peut-être surtout, un combat singulier entre francophones et anglophones. Un combat qui engendre encore les passions.
Tant de récits
Il existe peu de rivalités sportives aussi largement documentées que celle qui concerne les « Buds » et les « Habs », surnoms que les anglophones donnent aux deux équipes. D'un océan à l'autre, les amateurs se rangent dans un camp ou dans l'autre. Encore aujourd'hui, le Canadien a des supporteurs de Saint-Jean, Terre-Neuve, à Vancouver.
Une rivalité qui défie le temps.
Figurant parmi les six plus anciennes franchises de la Ligue nationale, Toronto et Montréal en sont aussi les plus primées. Rien de moins que 31 présences en finale et 24 coupes Stanley pour le Canadien, alors que Toronto a soulevé le précieux trophée 13 fois en 19 finales.
Les aléas du calendrier et de nombreux réaménagements des divisions par la Ligue nationale, au fil des ans, ont fait en sorte que les plus grands rivaux de l'histoire du hockey ne se sont pas affrontés en séries éliminatoires depuis 1979.
Cinq finales ont opposé le Canadien et les Leafs. Montréal a gagné deux d'entre elles en 1959 et en 1960. Les autres sont allées à Toronto en 1947, en 1951 et la dernière en 1967. Cette année-là, c'est au pavillon de l'Ontario à l'Expo universelle de Montréal que les amateurs ont dû se rendre pour y voir l'emblème de la suprématie du hockey.
Les Maple Leafs n'ont jamais détenu le trophée depuis. Ce qui fait dire à Yvan Cournoyer, gagnant de 10 coupes, que toutes les photos souvenirs des Leafs de 1967 sont en noir et blanc...
Des légendes à la pelle
L'intérêt est aussi attribuable au fait que les deux équipes ont compté, dans leurs rangs, plusieurs des plus grands noms de l'histoire du hockey: Maurice Richard, Jean Béliveau, Guy Lafleur, Dave Keon, Frank Mahovlich, Darryl Sittler, Johnny Bower, Jacques Plante, Borje Salming, Larry Robinson, Syl Apps, Howie Morentz, Punch Imlach, Toe Blake et tant d'autres encore.
Les Maple Leafs, champions de 1967
Cette compilation sommaire ressemble à une visite au Temple de la renommée. Soit dit en passant, de nombreux Montréalais considèrent encore que ce musée à la gloire du hockey devrait avoir pignon sur rue au milieu du fleuve Saint-Laurent, plutôt que sur les rives du lac Ontario. Tiens, voilà un autre beau sujet de discorde!
Au temps où le hockey était une religion et les amateurs de fidèles pratiquants, les samedis soirs étaient de grands-messes avec des rituels bien établis. Les francophones se rassemblaient autour du téléviseur où René Lecavalier décrivait les faits et gestes des héros tricolores.
Dans le reste du Canada, c'est Danny Gallivan qui agissait comme témoin privilégié. La musique thème de La Soirée du Hockey ou de Hockey Night in Canada est alors un deuxième hymne national.
Invasion
Toutes les visites des Maple Leafs à Montréal, et celle de samedi ne fera pas exception, s'accompagnent d'une marée bleue et blanche. Dans les gradins du Centre Bell, de quatre à cinq mille supporteurs torontois feront probablement encore plus de bruit que les partisans de la « Sainte Flanelle ».
L'ambiance est électrique. Heureusement, les débordements à l'extérieur de la patinoire sont à peu près inexistants. Les comptes se règlent toujours par joueurs interposés. Dans les années 60, John Ferguson faisait son affaire d'Eddie Shack. Aujourd'hui, les amateurs espèrent une confrontation entre Tie Domi et Raitis Ivanans, quand ce dernier reprendra sa place dans la formation.
La rencontre sera la 668e de l'histoire entre les deux équipes. À ce jour, Montréal totalise 315 victoires et 263 défaites contre Toronto. 88 duels ont pris fin sur des résultats nuls. Au chapitre des buts, le Canadien mène 2032 à 1838. Une avance que l'on peut qualifier de confortable.
Mais dans les chaumières, la discussion bat encore son plein.